A l'abattoir, l'animal est dépouillé le plus proprement possible. Les ouvriers "fleurent", autrement dit décollent, avec soin la peau des flancs de la bête. Le travail terminé, on réunit tous les cuirs, et une charrette les transporte de l'autre côté du boulevard.
Là, nouvelles opérations. Chaque peau est soigneusement nettoyée, grattée, et les ouvriers la munissent d'une étiquette portant un matricule qui ne changera pas, quel que soit le voyage effectué par la peau. Bien étendue, celle-ci reçoit ensuite une couche de sel (curieusement mélangé avec de la naphtaline) : elle s'imprègnera de cette saumure pendant plusieurs jours. Les peaux seront alors roulées et mises en "lots", en attendant les acheteurs éventuels, presque toujours des tanneurs.
Dans un immense hangar nous découvrons des centaines et de centaines de peaux : vaches, taureaux, bœufs, veaux, moutons, etc. Elles sont soigneusement classées et référencées (parmi les bovins, nous trouvons les lourds et les légers, pour les moutons les laines, demi-laine, laine courte et rason). On utilise 15 tonnes de sel par mois pour la conservation. Un raccordement direct du chemin de fer et des expéditions par route permettent un incessant départ des cuirs.
Où vont toutes ces peaux ?
Huit ouvriers et quatre employés de bureau sont chargés de la bonne marche de la Halle aux Cuirs, où il règne une grande activité, quasi quotidienne. Les marchandises sont généralement vendues à Paris, puis expédiées un peu partout par les soins des acheteurs.
L'utilisation des cuirs est très diverse. Les "lourds" servent à fabriquer des courroies ; le veau des empeignes de souliers ; la vache, des semelles ; les moutons se retrouvent sur les canadiennes ; les "petits veaux" dans les sacs à main des dames et autres objets de maroquinerie.
Nous pourrions citer à l'infini les utilisations du cuir, matériau irremplaçable.
Nous ne pouvons résister à l'envie de publier un petit extrait des conditions de vente des peaux : "Les cuirs de bœufs, vaches et taureaux sont livrés sans cornes ni crânes, queues vides, crotte déduite avant pesage, sans surcharge de viande, graisse et nerfs". Obligations savoureuses, n'est-ce pas ?
Pendant que nous prenons quelques clichés, les ouvriers continuent leur labeur dans cette Halle aux Cuirs bourdonnante d'activité. Les peaux arrivent sans cesse de l'entrepôt. On gratte, on lave, on sale. Comme cela toute l'année. Que de peaux, que de peaux !
Et, entre nous, que de carnivores ! Car, bien entendu, si nous utilisons le cuir ainsi récupéré, nous aurons avant tout mangé la viande...
Marc LAMBLA
Photos et clichés : l'Aisne Nouvelle
Copie d'un article de l'Aisne nouvelle du 26 mars 1957 - Fonds local de la médiathèque de Saint-Quentin
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